François Piquemal

Amparo Poch y Gascón

J’ai évoqué dans un précédent billet la figure historique de Federica Montseny. Ministre de la santé sous la Seconde République espagnole avant de devenir toulousaine suite à la Retirada. Un peu moins connue, mais pourtant tout aussi illustre, Amparo Poch y Gascón a un parcours à découvrir.

Une de ses premières prouesses est de commencer des études de médecine à Saragosse, sa ville natale, en étant alors l’unique femme parmi 436 élèves ! C’est durant ses études qu’elle commence à écrire en faveur des études universitaires pour les femmes et contre leur assignation à un rôle familial et maternel traditionnel. Elle obtient son diplôme de médecin le 3 octobre 1929 et commence à exercer à Saragosse où elle va ouvrir deux cabinets pour les femmes ouvrières et les enfants. Elle gagne un prix dès 1931 sur la protection de l’enfance après avoir publié un livret de conseil aux femmes. Très en avance sur son temps elle publie le livre La vie sexuelle de la femme dans lequel elle incite les femmes à s’épanouir dans l’amour libre et la pratique de la bisexualité.

En 1934 elle emménage à Madrid où elle va être comme à son habitude très active. Elle poursuit son travail de médecin avec des tarifs sociaux pour les familles ouvrières et se spécialise dans la puériculture. Elle fonde avec la journaliste Lucia Sanchez Saornil et l’avocate Mercedes Comaposada Guillen, l’organisation féminine libertaire “Mujeres Libres”.

Lorsque la guerre civile espagnole éclate elle devient directrice de l’assistance sociale au Ministère de la santé et de l’assistance sociale de Federica Montseny, alors Ministre de la Santé. C’est elle qui sera en charge notamment des Liberatorios, maisons destinées aux prostituées où elles peuvent recevoir des soins de santé physique et mentale et une formation professionnelle pour leur permettre d’acquérir une indépendance économique. Alors qu’elle a déménagé à Barcelone pour un devenir directrice d’un projet de lieu féministe, elle est contrainte à l’exil en décembre 1938 pour fuir les persécutions franquistes. Elle va pendant un temps travailler comme médecin auprès des enfants exilés, avant de se réfugier à Nîmes durant la Seconde Guerre Mondiale. C’est à l’issue de celle-ci qu’elle va rejoindre Toulouse où elle travaillera à l’hôpital de Varsovie, aujourd’hui nommé hôpital Joseph Ducuing. Elle y restera jusqu’à sa mort en 1968.

Médecin, écrivaine, militante féministe. Amparo Poch y Gascón se faisait appeler “Doctora Salud Alegre”, la “Docteur de la Santé heureuse”, tout un programme avant-gardiste et d’émancipation qui trouve des échos dans les dispositions mises en œuvre notamment à Barcelone par Ada Colau. Ce sera l’objet d’un autre billet.

Federica Montseny, Amparo Poch y Gascón, mais aussi Angèle Bettini Del Rio, Marie-Louise Dissard, de nombreuses femmes ont marqué l’Histoire de Toulouse et devraient davantage y être valorisées. Pourquoi pas une place des femmes combattantes permettant d’entretenir leur mémoire à Toulouse ?

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