Et si on parlait du TFC ? Du quoi ? Du Toulouse Football Club, oui du TFC. Il aura été un angle mort, parmi d’autres, de la campagne municipale. Certes quand on dit Toulouse, en dehors de la Haute-Garonne, les poncifs qui reviennent sont rugby-avions-cassoulet. Mais quand on évoque le TFC, c’est plutôt indifférence voire moqueries qui s’expriment. Dommage, car un club de foot, c’est plus que 11 joueurs sur un terrain ; cela peut être aussi une carte de visite des valeurs que porte une ville. Alors pourquoi ne pas avoir cette envie pour notre club ?
Je précise qu’à l’heure où j’écris ces lignes, la presse locale se fait l’écho de rumeurs de vente du club à un consortium sino-américain. Son propriétaire actuel, M. Sadran, dément pour le moment et assure privilégier une option hexagonale. Il est donc compliqué à cette heure d’anticiper les prochaines étapes de ce feuilleton.
Ce qui est certain qu’avant l’épisode Covid 19 le club filait tout droit en Ligue 2 et que la crise était palpable : 20e au classement, énième entraîneur débarqué, supporters frustrés, club devenu la mascotte du moment de la Fédération Française de la Loose. Quand cette mauvaise spirale finira-t-elle ?
Le paradoxe du TFC, c’est que l’affluence en tribune au Stadium (16 224 spectateurs pour la saison 2018-2019) n’a pas à rougir face à celle d’Ernest Wallon (18 385 spectateurs). Il y a donc dans notre ville, s’il était besoin de s’en assurer, un public pour le foot. Un public qui a vibré pour les Marcico, Emana, Ben Yedder et consorts… Mais un club qui peine à susciter l’enthousiasme au point que l’on est surpris de voir davantage de maillots du PSG ou de l’OM quand les Violets accueillent ces deux clubs.
Sans exagérer son influence, on ne peut pas considérer le TFC comme une entité déconnectée de la ville dont les résultats et les péripéties importent peu. La future municipalité doit donc travailler à renouveler cet enthousiasme qui a existé à certaines périodes du club. Le foot et les clubs qui le font vivre sont des organisations sportives mais aussi culturelles qui peuvent fédérer, inclure et inspirer. Un club peut mettre en lumière les caractères, les valeurs d’une ville, que ce soit dans son ambition de résultats, et plus intéressant encore, dans son état d’esprit .
Songeons au FC Lorient et à l’En Avant Guingamp en Bretagne, symboles de convivialité et d’équipes joueuses. Songeons au RC Lens, au FC Sochaux et à l’AS Saint Étienne, clubs des classes populaires et tenants d’une certaine culture ouvrière. Songeons à l’Olympique de Marseille ou au FC Barcelone, clubs qui transcendent les appartenances sociales et sont les porte-drapeaux d’une ville voire d’une région.
Le football est un formidable vecteur culturel et social. Il est donc important de donner au TFC les moyens d’incarner notre ville dans nos valeurs démocratiques, d’inclusion, de solidarité et de partage.
Alors par où commencer ?
Le 1er Janvier dernier est entrée en exercice la convention décennale signée par le président sortant de la Métropole toulousaine avec la direction du TFC. Si celle-ci augmente la redevance, passant à 1 624 000 Euros (divisible par 2 en cas de descente en Ligue 2, scénario qui se profile), elle prévoit également que les grosses réparations soient du ressort de la collectivité qui prend en charge le nettoyage des espaces mis à disposition de façon temporaire après les matchs. Par ailleurs, la Métropole reste responsable de la pelouse et s’engage sur la réalisation de travaux de mise en conformité éventuellement demandés lors de compétitions sportives. Elle a programmé des chantiers en vue de grands événements sportifs : achat de la luminothérapie, installation d’écrans géants… La convention établit aussi la possibilité d’un changement de nom (naming) du Stadium, sur lequel il convient d’être particulièrement vigilants pour éviter une marchandisation de ce bien public.
Mais nous devons aller plus loin. La prochaine municipalité doit entamer des discussions avec la direction du club pour envisager ce qui pourrait être mis en place et construire un projet à la hauteur de notre ville et de notre agglomération. Il ne s’agit pas de demander des résultats au-dessus des moyens financiers de la direction, mais un nouveau souffle pour le Stadium.
Cela ne pourra se réaliser sans que les supporters soient plus souvent consultés, participent davantage aux instances du club, puissent échanger avec l’équipe dirigeante, sportive, avec les joueurs. Le club doit être encore plus ouvert sur les clubs de la ville et de la métropole. Il s’agit de tisser des partenariats privilégiés avec les clubs de quartiers, que chaque pitchoune de la ville puisse une fois par saison aller voir les Violets jouer. Le club, mais aussi la future municipalité, doit rompre avec l’opacité de la répartition des subventions. On sait qu’aujourd’hui un seul club touche plus que cinq autres réunis avec pourtant moins de licenciés. On voit aussi des terrains laissés à l’abandon pour empêcher des clubs de s’y installer et tenter ainsi de gommer une identité de quartier, facette méconnue mais réelle de la gentrification.
Cela passe aussi par notre équipe féminine qui doit pouvoir se développer activement à tous les niveaux. Il faut que l’équipe fanion féminine puisse jouer en Ligue 1 et se donner, pourquoi pas, comme objectif à moyen terme de concurrencer Lyon, Paris et Montpellier pour jouer la Ligue des Champions.
Le nouveau souffle du TFC, au moyen d’une identité de convivialité, d’accueil et de partage chère aux habitant-e-s, doit s’incarner sur et en dehors des terrains. Un engagement de la collectivité et des contribuables oblige à un droit de regard sur le devenir du TFC pour mieux le soutenir et qu’enfin il soit synonyme de plaisir et de fierté, plutôt que de galère pour ses supporters.